Le tour du double

La naissance de ce blog doit beaucoup à la lecture des pages de La cité des mots. Alberto Manguel explore 5 mythes qui éclairent notre société contemporaine. Le premier parle de la figure de l’étranger, du double…

  J’ai ainsi redécouvert l’épopée du Mésopotamien Gilgamesh, fondateur de la ville d’Uruk. Devenu roi, il est si colérique, que les habitants de la ville en appellent aux Dieux pour leur porter assistance. Ces derniers envoient alors Enkidu, un être sauvage, qui, après s’être battu avec Gilgamesh, finit par l’embrasser (au sens premier). Tout deux, pourtant diamétralement opposés, deviennent comme frères, l’un est le symbole de la civilité, l’autre de la sauvagerie. Grâce à ce double, Gilgamesh s’apaise. Il est juste et tempéré tant qu’Enkidu est à ses côtés.

La figure du double, étranger et miroir, se poursuit dans de nombreuses références culturelles. Ainsi selon les définitions, ce qui est double peut aussi bien être « composé de deux éléments ou séries d’éléments identiques«  ou  » présenter deux aspects différents ou même opposés, dont l’un est dissimulé ». Un mot lui même double, donc.

  • La figure de Janus aux deux têtes, et plus récemment les deux visages de Jekyll/Hyde, effectuent la synthèse de Gilgamesh et Enkudu en un même être. On ne sait alors jamais qui l’on a face à soi, deux visages pour une même personne. De cette incertitude peut naitre la méfiance, qui se retrouve dans le dérivé « duplicité« .
  • Le terme allemand de Doppelgänger (« double » ou « sosie » en français) insiste sur les similarités étonnantes de cet autre qui est comme une deuxième version de l’original.
  • Enfin exotikos, le mot grec qui a donné en français l’adjectif « extérieur », désigne ce qu’il y a derrière les murs de la Cité grecque. Au vu de son évolution en « exotisme » on voit enfin l’attirance que peut procurer l’autre, ce qui nous est étranger.

Cette dualité du double peut nous enrichir comme le souligne le mythe de Gilgamesh, encore faut-il s’ouvrir à l’autre, accepter une identité ouverte, notamment aux changements. L’identité devient alors ipséite. « L’ipséité c’est la conscience de soi, mais d’un soi qui vit et se transforme » pour citer le blog Persopolitique. Cela peut inquiéter bien sur, mais comme le faisait remarquer un ami, il est plus facile de répondre à la question « vers quoi tends-tu ?  » qu’à la question « qui es-tu ? ».

Bonus :

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